Victor Hugo
Dos
poemas
a
su hija Léopoldine (1824-1843)
en
el último número de la revista Fénix
Versiones
de Alejandro Bekes
I. Mañana, al alba...
Mañana, al alba, blancos los campos en la aurora,
partiré. Ya lo ves, sé bien que tú me esperas.
Andaré por los bosques, por montañas austeras.
Lejos de ti no puedo estar ya ni una hora.
Andaré, pensativo, fija en mí la mirada,
sin ver nada ni oír lo que afuera murmura,
solo, oscuro, encorvado, con las manos cruzadas,
triste, y para mí el día será la noche oscura.
No miraré ni el oro que la tarde derrumba
ni hacia Harfleur los veleros de lejano temblor.
Y cuando haya llegado, pondré sobre tu tumba
ramos de acebo verde y de brezos en flor.
[Las
contemplaciones, Libro IV, XIV]
*
Demain, dès l’aube...
Demain, dès l’aube, à l’heure où blanchit la
campagne,
Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m’attends.
J’irai par la forêt, j’irai par la montagne.
Je
ne puis demeurer loin de toi plus longtemps.
Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées,
Sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit,
Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées,
Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit.
Je ne regarderai ni l’or du soir qui tombe,
Ni les voiles au loin descendant vers Harfleur,
Et quand j’arriverai, je mettrai sur ta tombe
Un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur.
[Les
contemplations, Livre IV, XIV]
II.
Cuando vivíamos unidos
Cuando
vivíamos unidos
en
las colinas de otro tiempo, donde
el
agua fluye y el arbusto tiembla,
en
la casa que linda con los bosques,
tenía
ella diez años y yo treinta;
yo
era para ella el universo.
¡Ah,
cómo huele allí la hierba
bajo
los verdes árboles inmensos!
Ella
hacía próspera mi suerte,
ligera
mi labor, azul mi cielo.
Cuando
ella me decía: “Padre mío”,
todo
de Dios se me llenaba el pecho.
A
través de mis sueños sin medida
yo la escuchaba, alegre, hablar
y
mi frente en la sombra se alumbraba
bajo
la luz de su mirar.
Tenía
el andar de una princesa
cuando
yo la llevaba de la mano.
Buscaba
sin cesar las flores
y
sin cesar los pobres a su paso.
Solía
dar como quien roba,
a
los ojos de todos escondida.
Oh,
aquella ropa tan modesta
que
ella llevaba, ¿quién la olvidaría?
De
noche, al lado de mi vela,
ella
en sigilo murmuraba,
mientras
a la ventana enrojecida
mariposas
nocturnas se agolpaban.
Los
ángeles en ella se miraban.
¡Qué
deliciosa daba su buen día!
El
cielo en las pupilas le había puesto
esa
mirada que jamás mentía.
¡Oh,
tan joven aún, en mi destino
yo
la había visto aparecer!
¡Era
la hija de mi aurora,
la
estrella de mi amanecer!
Cuando
la luna pura y clara
alumbraba
las dulces estaciones,
¡cómo
andábamos por el llano
y
corríamos por los bosques!
Después,
hacia la luz aislada
que
señalaba nuestro hogar oscuro
volvíamos
andando por el valle,
tras
doblar el rincón del viejo muro.
Volvíamos
hablando, deslumbrados,
del
cielo y su magnífico dosel.
Yo
componía esa joven alma
como
la abeja hace su miel.
Siempre
al llegar traía ella alegría,
ángel
dulce de claro pensamiento…
¡Todas
estas cosas pasaron
como
la sombra y como el viento!
[Las contemplaciones, Libro IV, VI]
*
Quand nous habitions tous
ensemble
Quand nous habitions tous ensemble
Sur nos collines d'autrefois,
Où l'eau court, où le buisson tremble,
Dans la maison qui touche aux bois,
Elle avait dix ans, et moi trente ;
J'étais pour elle l'univers.
Oh! comme l'herbe est odorante
Sous les arbres profonds et verts !
Elle faisait mon sort prospère,
Mon travail léger, mon ciel bleu.
Lorsqu'elle me disait: Mon père,
Tout mon cœur s'écriait : Mon Dieu !
À
travers mes songes sans nombre,
J'écoutais son parler joyeux,
Et mon front s'éclairait dans l'ombre
À
la lumière de ses yeux.
Elle avait l'air d'une princesse
Quand je la tenais par la main.
Elle cherchait des fleurs sans cesse
Et des pauvres dans le chemin.
Elle donnait comme on dérobe,
En
se cachant aux yeux de tous.
Oh ! la belle petite robe
Qu'elle avait, vous rappelez-vous ?
Le
soir, auprès de ma bougie,
Elle
jasait à petit bruit,
Tandis
qu'à la vitre rougie
Heurtaient
les papillons de nuit.
Les
anges se miraient en elle.
Que
son bonjour était charmant !
Le
ciel mettait dans sa prunelle
Ce
regard qui jamais ne ment.
Oh!
je l'avais, si jeune encore,
Vue
apparaître en mon destin !
C'était l'enfant de mon aurore,
Et mon étoile du matin !
Quand la lune claire et sereine
Brillait aux cieux, dans ces beaux mois,
Comme nous allions dans la plaine !
Comme nous courions dans les bois !
Puis,
vers la lumière isolée
Étoilant
le logis obscur,
Nous
revenions par la vallée
En tournant le coin du vieux mur ;
Nous revenions, cœurs pleins de flamme,
En
parlant des splendeurs du ciel.
Je
composais cette jeune âme
Comme
l'abeille fait son miel.
Doux
ange aux candides pensées,
Elle
était gaie en arrivant... -
Toutes ces choses sont passées
Comme l'ombre et comme le vent !
[Les contemplations, Livre IV, VI]
Victor Hugo
Otros
poemas de Victor Hugo,
en
edición bilingüe, traducidos
y
prologados por Alejandro Bekes,
en:
“Fénix” N° 30, Año XXV,
Editorial
Brujas, Córdoba, 2022.
[Para
solicitar su envío a domicilio:
https://www.editorialbrujas.com.ar/home]
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